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HUMANITÉS CLASSIQUES AFRICAINES

La notion d'Humanités Classiques Africaines

Généralités

Tout peuple possède ses propres Humanités Classiques qui contribuent à forger son identité culturelle et son cadre intellectuel (paradigme). Leur étude englobe généralement l’examen méthodologique de ses productions intellectuelles, philosophiques et artistiques ancestrales, sans oublier le domaine des Sciences Sociales (us et coutumes, spiritualité, cultures et traditions).

En 2001, le Ministère de l’Education National fixait par exemple ce cap à l’enseignement des Humanités Classiques Européennes en direction des lycéens. Il s’agit de leur permettre de :

  • Comprendre l'importance du monde gréco-romain dans la culture française,

  • Contribuer à l'acquisition de compétences intellectuelles,

  • Se situer dans l'histoire,

  • Comprendre les événements et idées d'aujourd'hui,

  • Former la personnalité du lycéen.

La connaissance de ses Humanités Classiques permet donc de donner un sens à son identité historico-culturelle, de valoriser son patrimoine intellectuel ancestral et de définir son idéal de civilisation.



1. La notion d’Humanités Classiques Africaines


Le terme Humanités Classiques Africaines a été utilisé pour la première fois par le professeur Cheikh Anta Diop pour désigner notre patrimoine historique Égypto-nubien. Celui-ci développa l’idée pertinente que les civilisations de la vallée du Nil (Égypte, Nubie) devront à l’avenir servir de socle pédagogique dans l’enseignement scolaire en Afrique et au-delà (diaspora africaine). Ceci afin de renforcer le sentiment d’unité panafricaine (communauté de destin) et de stimuler des initiatives panafricaines dans de nombreux domaines (énergie, industrie, universités spécialisées…).

Historiquement nos Humanités Classiques Africaines débutent dès la création des premières cités soudanaises dans la vallée du Nil, vers 12 000 de l’ère ancienne africaine et se terminent à la conquête de l’Égypte par Alexandre le Grand en -332. Néanmoins les créations intellectuelles antérieures devront être aussi étudiées (géométrie à Blombos, mathématiques à Ishango, etc.)


2. A quoi servent les Humanités Classiques ?

La notion d’Humanités Classiques sous-tend celles d’identité culturelle et de paradigme. Le paradigme désigne une façon particulière de percevoir le monde, conçu par un groupe d’individus appartenant à un peuple donné. Cela lui assure une cohérence dans sa vision du monde et lui permet de définir son projet civilisationnel et de d’exprimer sa singularité à travers son identité culturelle.

Ainsi, sans ses propres Humanités Classiques, il est impossible pour un groupe d’individus, d’avoir son propre paradigme et donc de conceptualiser sa culture et enfin de bâtir son projet de civilisation.


3. Humanités Classiques Africaines & Gwo Ka

Les paradigmes agissent comme des systèmes de réflexion incompatibles entre eux car ils répondent à des projets de civilisation divergents. Certains agissent pour aliéner culturellement d’autres pour renforcer la mémoire histoire. Voyons cela avec le cas du Gwo Ka de la Guadeloupe.


a) Son origine selon le Paradigme Occidental

Dans l’univers ultra-marin, il existe un art musical particulier né durant la période esclavagiste et reposant sur l’utilisation d’instruments de percussion, que l’on découvre uniquement en Guadeloupe, à savoir le « gwo ka » ou « gwoka ».

L’étymologie du terme « gwo ka », nous dit l’encyclopédie en ligne Wikipédia, « serait la déformation créole « gwo ka » de « gros-quart », (désignant) la contenance usuelle des tonneaux à partir desquels les esclaves confectionnaient leurs instruments ». Ces tonneaux qui servaient à l’origine à « conditionner la viande salée ou le vin » étaient envoyés vers la métropole à bord des bateaux. Ils seraient une invention des anglais et la notion de « quart », comme unité de volume, viendrait d’eux.

Enfin, à l’origine si les tambours étaient conçus sur les colonies à partir d’un tronc d’arbre, les tambouyés trouvèrent dans le baril, un gain de temps et une sonorité particulière. Ce fut une innovation majeure réalisée aux Antilles.


b) Son origine dans le Paradigme Africain

Il existe dans la tradition africaine, deux classes d’instruments dits « sacrés », à savoir les cordophones et les instruments de percussion (tambours). En Guadeloupe cet instrument porte le nom de tambour « Ka ».

L’art musical appelé « Gwo Ka » en Guadeloupe procède en réalité de la culture originelle des hommes et des femmes réduits en esclavage et provenant d’Afrique. A ce titre, la tradition africaine (Angola, Congo, Gabon, Zambie, Mozambique, Zimbabwe, Comores, Guinée, Sao Tomé et Principe, etc), possède un lexique particulier en langue bantoue (kikongo, xhosa, tshiluba, kikuyu, chichewa, lingala, shona, fang, kimbindu, douala, tonga, etc…) pour les instruments de percussion, qui est à l’origine même du terme «Gwo ka ».


En effet, le nom générique des instruments de percussion est « N’go ma » dans la tradition bantoue, terme qui désigne la grande famille des tambours. Le terme « Go ma » désigne lui, les chants notamment sacrés, rituels et spirituels. Ainsi, dans la famille des « N’go ma », il y a un tambour particulier que l’on dénomme « N’go ka ». Ce sont les européens qui ont ajouté le « n » qui en réalité ne sert qu’à spécifier le son particulièrement percutant et grave de l’instrument. C’est cette même quête qui est à l’origine du « w » glissé entre le « g » et le « o ». Rappelons que le nom actuel de l’Angola, est une déformation européenne de « N’Gola ».


La dimension sacrée qu’exprime le terme « ka » est très ancienne. On le retrouve à Kemet (l’Egypte ancienne) où déjà le même mot désignait ce qui est « sacré », ce qui procède de la « force vitale » (Ka) du Créateur de l’Univers et de la « parole sacrée » des ancêtres. Il existait d’ailleurs des « Hem ka », soit des « prêtres du ka », qui jouaient aussi du tambour et qui enseignaient que la vibration musicale servait de véhicule au « ka » afin qu’il pénètre le cœur des hommes et répande l’harmonie.


Si pour les Dogons, « le rythme musical produit par un tambour se traduit en formules types qui représentent la Parole de cet instrument », on en déduit que les hauts initiés africains qui ont élaboré le Gwo Ka en Guadeloupe, l’ont fait volontairement reposer sur 7 formules types, 7 paroles initiatiques destinés à connecter les individus aux 7 planètes majeures de notre système solaire et leur permettre de ressentir leurs vibrations, perçues comme les 7 voyelles de l’univers, sachant que le soleil lui, symbolisé par le cercle du tambour placé de face, est lui silencieux. Ainsi, les 7 rythmes du Gwo ka (Menndé, Graj, Toumblak, Kaladja, Padjanbel, Léwoz et Woulé), rappellent encore les 7 tambours rituels des Kiyus ou encore les 7 ans du Keniemba chez les Bambaras.


A propos des barils, l’historiographie dévoile qu’ils ont été inventés en Afrique noire de la période pharaonique où ils étaient déjà utilisés pour transporter des liquides et des grains (on peut les voir dans les hiéroglyphes) mais chose particulière, l’unité de mesure référentielle étaient déjà le « khar ». Les européens, à l’époque gréco-romaine, ont simplement repris ces notions africaines à leur compte.


D’autre part, ces barils étaient aussi utilisés pour la confection de tambours. A ce titre, une inscription particulière remontant à 3500 ans, a été trouvée dans un tombeau à côté d’un tambour baril (fait de bois et possédant des cercles en fer), plus ou moins en bon état. Dans ce tombeau donc qui date du Nouvel Empire (-1500 ans), le tambouyé qui nous dit ceci : « J’ai passé des années à frapper du tambour tous les jours ». Preuve que ce baril lui a servi de tambour.



Enfin, le mot « tambour » procède du terme pharaonique « tébèn », tout comme le mot « tam tam », découle du terme « kam kam » dont la symbolique (déterminatif) est une peau d’animal ou encore un homme frappant son tambour.


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